Guerre de tranchées à UFDG : Cellou Dalein gagne une manche contre Ousmane Gaoual ?

Parfois, une décision administrative anodine en apparence peut cacher une manœuvre politique bien plus stratégique. C’est peut-être ce que nous venons de vivre avec la dernière note officielle signée à Abidjan par Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG).

En nommant Falilou Barry à la tête du Comité National des Sages, en remplacement d’un Elhadj Saidou Diallo »indisponible pour raisons de santé », Cellou Dalein ne se contente pas de combler un vide. Il réorganise discrètement un des rares leviers du parti où les équilibres tribaux, historiques et stratégiques sont encore sensibles.

Un père discret, un fils bruyant

Le détail que la note officielle omet – mais que personne à l’UFDG n’ignore – c’est que Elhadj Saidou Diallo est le père biologique de l’actuel ministre et ancien cadre de l’UFDG, Ousmane Gaoual Diallo. Ce dernier est aujourd’hui en conflit ouvert avec Cellou Dalein Diallo, après avoir été exclu du parti. Une exclusion qu’il n’a ni digérée ni oubliée.

Depuis, Ousmane Gaoual s’est lancé dans une entreprise méthodique (et parfois théâtrale) de décrédibilisation de son ancien mentor. Il ne cache plus ses intentions : affaiblir Cellou Dalein, jusqu’à provoquer son départ de la tête de l’UFDG. Dans ce contexte, le retrait de son père d’un organe aussi symbolique que le Conseil des Sages est interprété, par plus d’un, comme un affaiblissement ciblé de son réseau familial et politique au sein du parti.

Saidou Diallo, témoin d’une époque révolue

Pour comprendre la portée de ce remplacement, il faut revenir aux années 2004-2005, quand Elhadj Saidou Diallo arrive à l’UFDG avec les Bajuls et les Portos, transfuges du PGP. C’est un moment fondateur, qui marque l’ouverture ethno-politique de l’UFDG.

Élu en 2009 à la tête du Conseil des Sages lors du Congrès, Elhadj Saidou a depuis incarné cette vieille garde, celle qui a bâti l’UFDG avec des figures comme le doyen Faya Oukondouno, Elhadj Oumar Kahn, et d’autres désormais disparus. Aujourd’hui, il est l’un des derniers survivants de cette génération. Son retrait, pour raisons de santé, semble donc aussi marquer la fin d’un cycle.

Frustrations internes : la marmite commence à bouillir

Mais cette décision intervient aussi dans un climat de tensions internes au sein du Conseil Politique. Plusieurs décisions récentes, notamment sur les fédérations de la route Guinée ou la gestion de certaines structures régionales, ont provoqué des remous discrets, mais bien réels.

Il se murmure que tout le monde ne valide pas les orientations de Cellou Dalein, surtout depuis l’exil ivoirien du président. Loin de Conakry, certaines voix commencent à s’interroger sur la capacité du leader à maintenir une cohésion durable et inclusive.

Une manœuvre habile, mais risquée

En plaçant Falilou Barry, fidèle du Conseil Politique, à la tête du Conseil des Sages, Cellou Dalein semble vouloir verrouiller un espace stratégique pour éviter que des dissidences ne prennent forme via des figures plus anciennes, plus autonomes, voire plus proches de ses adversaires internes.

Mais ce jeu d’équilibre est fragile : remplacer un patriarche respecté par un profil plus politique pourrait être vu comme une volonté de contrôle plus que de continuité. Et dans un parti encore traumatisé par les départs et les divisions, cela peut nourrir des frustrations silencieuses… jusqu’à ce qu’elles deviennent bruyantes.

Le départ d’Elhadj Saidou Diallo, même s’il est présenté comme une décision « de santé », intervient dans un moment de recomposition silencieuse mais profonde de l’UFDG. Cellou Dalein gagne peut-être une manche face à Ousmane Gaoual, mais chaque coup porté affaiblit aussi un peu plus l’édifice fragile de l’unité interne.

Et si le vrai défi, pour Cellou Dalein, était désormais moins Gaoual que la fatigue silencieuse des siens ?